Georges Charensol - Historien du cinéma.

Le livre « Panorama du cinéma » paraît chez Kra en 1929 à l’époque du muet. C’est la première Histoire du cinéma parue au monde.

Il nous dit : « J’ai découvert le cinéma à 5 ou 6 ans. » « Le cinéma était alors considéré comme un divertissement auquel personne n’attachait la moindre importance artistique. »

« Pour moi le grand événement c’est Forfaiture de Cecil B. de Mille. » « Mais à cette époque-là la qualité de l’image m’a fait prendre conscience que le cinéma n’était pas un simple divertissement comme je l’avais cru, mais que c’était un art et un art qui ne ressemblait à rien . »


« Pour moi, le cinéma ce sont des images et c’est la qualité de l’image qui immédiatement m’a frappé.»


« On peut parfaitement aimer à la fois René Clair et Robert Bresson. De même, j’ai adoré les films de l’époque expressionniste allemande : Murnau, Fritz Lang, etc., et tous les grands films américains de John Ford, Hawks, Walsh et ceux qui ont suivi. Je n’ai jamais suivi de règles, seulement mon instinct. »

 Dans le livre « Renaissance du cinéma français » parut en 1946, juste après guerre, il analyse les films qui viennent de sortir et qui annonce un cinéma renouvelé.

« Les enfants du paradis » 

L'essentiel, c'est la part qui revient à Marcel Carné : c'est lui qui a ordonné les images et tout de même, au cinéma, c'est bien elles qui importent d'abord. Carné est un des rares metteurs en scène qui sache créer autour de toutes ses œuvres une atmosphère assez personnelle pour que dès les premiers mètres on reconnaisse sa marque.

Certains morceaux des Enfants du paradis sont assurés de trouver place dans les classiques de l'écran (la poursuite de Garance par Debureau entre autres).

 

 

«Les dames du Bois de Boulogne »

On nous assure que le dialogue est l'essentiel et qu'il convient de faire parler sans cesse les comédiens, alors que Les Dames ne prononcent que les paroles indispensables et que l'extraordinaire scène de la cigarette écrasée sur un visage se déroule dans un silence que rythme seule une musique de danse. ».. »

Elle n'en ont pas moins placé Robert Bresson - même aux yeux de ses détracteurs - au tout premier rang.





« Citizen Kane »

Le film qui vient de nous être présenté est d'une audace inconcevable « .. », par sa volonté de rompre avec toutes les traditions d'Hollywood.

Mais si ce film cherche peut-être, dans la réalité, un support tangible, il s'élève vite au-dessus de l'anecdote pour constituer une étude de caractère saisissante.

 


« Ivan le terrible »

On a ici l'impression qu 'Eisenstein s'est attaché à modeler des morceaux puissants, des tableaux où se révèle sa profonde science de la composition, mais qu'il a négligé de porter la même attention à leur juxtaposition. Sans parler des faiblesses évidentes de la seconde partie, il faut dire que la farouche grandeur de la scène du couronnement qui ouvre le film exclut toute possibilité de progression. »

 

 

En conclusion il envisage le futur: « De quoi demain sera-t-il fait ?

Reste la télévision. Ou bien, en effet, on fera des films destinés à la télévision, et ceux-ci ne pourront qu'obéir aux lois traditionnelles du cinéma ; ou bien un art nouveau se créera qui empruntera au théâtre et à la radio plus qu'au cinéma, puisqu'il s'agira de spectacles directs.

La télévision peut vider les salles obscures, supprimer tout intermédiaire entre le producteur et le public, elle ne saurait porter atteinte à l'esthétique du cinéma. »

 

Renaissance du cinéma français : 1946 éditions du Sagittaire

 

 

Extrait d'une lettre d'Alexandre Astruc à Georges Charensol au sujet du livre :

 ….« Je tiens ce que vous avais écrit sur « les dames » pour la marque d'un esprit immanquablement juste. C'est la signature d'un homme qui ne se trompe pas. Aussi assurée que je pouvez être d'être dans le vrai en soutenant Bresson je me sentais inquiet. Votre article et votre livre tout entier rassurent. C'est un terrain solide sur lequel on peut s'avancer sans trembler.

Cocteau me disait : «  la lutte du singulier et du pluriel recommence ». Or il n'est pas bon de partir solitaire au combat. Cherchez autour de vous parmi vos camarades de la presse cinématographique ceux qui ont compris l'importance de Wells et de Bresson. L'un d'eux auquel j'ai résolu de ne plus serrer la main, a été jusqu'à écrire qu'on devrait ôter la caméra des mains de Mr Wells. Je lui permet de ce reconnaître a ce joli vœux. »….