ROUAULT - Par G. Charensol


-" Rouault était un personnage extrêment secret, étrange "-

(extrait du livre : " De Montmartre à Montparnasse " - 1990).


Reproduction de correspondances en bas de page.


En 1926, G.Charensol écrivait un livre sur Georges Rouault -aux Editions des Quatre Chemins- avec 40 reproductions de tableaux.

Touché par l’expression humaine et l’expression plastique des oeuvres de Rouault, il avait une grande admiration pour ce peintre et lui rendit visite dans son appartement de la Rue de La Rochefoucault :
- " il vous entretiendra de formes et de couleurs, jamais d’expression " écrit-il.

" Pendant des heures Georges Rouault parle des maîtres et surtout de Gustave Moreau, sujet inépuisable… "

Plus tard il entretint une correspondance amicale avec Isabelle Rouault, qui se consacra à la conservation des œuvres de son père.

Dans ce qui fut son premier livre, G. Charensol parle de l’homme et de l’œuvre, soulignant le contraste entre la vie de cet homme tranquille à Paris et les tourments de son œuvre picturale.

En s’appuyant sur ses entretiens avec G. Rouault, il distingue deux périodes dans sa vie d’artiste, encadrant une forte crise psychologique et une grave maladie. Mais son inspiration et l’atmosphère de ses peintures ne seront pas très différents après 1902.

" Il m’expliqua que ces thèmes peu nombreux, sur lesquels son œuvre entière est construite s’étaient imposés à lui…. "

Ces sont les sujets les plus intenses, les plus chargés de possibilités expressives qu’il choisit, et ses compositions de nus, ses paysages et ses paysans sont loin d’avoir dans son œuvre -comme quantité et comme qualité- une place égale à celle de ses Filles, de ses Clowns, de ses Juges et de ses Christs. "

" On parle souvent de ses bleus, des ses rouges, de ses noirs, mais ces couleurs, il les emploie surtout dans ses œuvres rapides, tandis qu’il travaille parfois durant des semaines sur la même toile, avec des matières sourdes et denses, des terres surtout. "

" J’ai essayé de l’examiner objectivement (nous dit-il) et de ne pas me laisser entraîner par cette œuvre si excitante pour l’imagination. "

" Mais il faut résister pour ne pas être pris dans ce monstrueux tourbillon de chair et de sang, car si nous aimons Rouault, c’est parce qu’il a permis à toutes les violences, à toutes les audaces de se déchaîner dans son œuvre…les barrages, les filtres, il les ignore ; sans peut-être sans rendre compte, il laisse passer à travers lui le flot grondant du plus tragique romantisme…

Et pourtant nous savons bien que c’est Rouault qui a raison : la vie est un sombre drame, mais à la fin les acteurs meurent, et ne se relèvent plus pour venir saluer. "

Ci-dessous, reproduction de correspondances (scan) :